Nouvelles technologies

Voiture autonome : les constructeurs sceptiques

Alors que de plus en plus de marques sont réticentes à l’idée d’investir dans la voiture autonome, les géants de la Silicon Valley et les équipementiers misent sur l’automobile de demain.

Voiture autonome

Pas un jour ne se passe sans une déclaration évoquant les limites de la voiture autonome. Plus courageux que ses homologues, Carlos Tavares a ouvert les hostilités dès le salon de Genève au mois de mars. Pour le PDG de PSA, pas question pour ses marques d’aller au-delà du niveau 3 de la conduite autonome. Ce qui implique tout de même que le conducteur puisse lâcher son volant sur autoroute, laissant son auto gérer la vitesse, les distances avec les autres voitures et le maintien dans la voie sans intervention humaine. Quant à l’autonomie totale, en ville et à la campagne, sans marquage au sol, le patron de PeugeotCitroën invoque les coûts trop élevés en recherche & développement de ces systèmes. Pour lui, « le coût exorbitant de ces voitures ne deviendra tel que celui qui pourra se les payer, ne sont pas derrière le volant, mais plutôt sur la banquette arrière ». A savoir des personnes qui peuvent déjà s’offrir un chauffeur. Fermez le ban, donc. Même pessimisme chez Waymo, la filiale spécialisée de Google qui a pourtant travaillé d’arrache-pied sur le sujet pendant des années avec les Google cars. Son patron, John Krafcik a même confié, il y a quelques mois de cela, que l’autonomie de niveau 5 ne verrait sans doute jamais le jour et relevait peut-être d’un mythe.

Elon Musk reste enthousiaste

Evidemment, pas question pour autant d’abandonner totalement la conduite déléguée à une intelligence artificielle. Elle conserve ses adeptes, comme l’enthousiaste Elon Musk qui vient d’annoncer le lancement d’un million de taxis autonomes dès l’année prochaine aux Etats-Unis. L’homme, qui n’en est pas à une annonce exagérée prêt, affirme que sa flotte de Tesla sera prête à temps et pourra embarquer des passagers sans chauffeur. Des voitures autonomes que des particuliers pourront acheter, selon Musk et, lorsqu’ils ne les utiliseront pas, ils pourront les louer en taxis automatiques. En attendant, d’autres constructeurs, un tantinet plus raisonnables, s’ils n’abandonnent pas totalement le développement des autos qui roulent sans chauffeurs, en délèguent le développement à d’autres.

Toyota et Volkswagen délèguent les recherches

C’est le cas du Japonais Toyota. Pour le géant nippon, pas d’affolement. La direction du groupe prétend que l’autonomie totale ne sera pas opérationnelle avant 2050. Il a donc tout le temps de s’y adonner. En attendant, il préfère confier le développement de ces robots à Uber et pour ce faire, il vient d’injecter près d’1 milliard dans l’ex start-up américaine devenue géante. Evidemment, 1 milliard de dollars, c’est énorme, mais c’est finalement peu de chose, puisque le roi des VTC, qui prévoit son entrée à Wall Street cette année, pense y lever entre 90 et 100 milliard de dollars. Une autre échelle. Parmi ces géants de l’automobile, il en est un autre qui, s’il est refroidi par les investissements colossaux en matière de voiture autonome, ne souhaite pas pour autant expliquer à la face du monde qu’il lâche l’affaire. Il s’agit du groupe Volkswagen qui, selon l’agence Reuters va freiner ses recherches en interne sans les abandonner. La solution ? La Chine et les nombreuses entreprises high-tech locales qui ne demandent que de travailler pour de tels clients.

Voiture autonome : les constructeurs hors-jeu ?

Reste qu’entre ceux qui abandonnent la recherche sur l’autonomie et ceux qui la délèguent, les grands groupes automobiles se placent en dehors du jeu. Ils ont évidemment d’autres chantiers à développer, comme la réduction des émissions de C02 et le développement de la voiture électrique. Reste qu’à long terme, ils prennent le risque de voir la mobilité du futur passer aux mains des entreprises technologiques américaines et chinoises.

Anne-Charlotte Laugier, journaliste, blogueuse et romancière (Ramsay).