Sécurité routière

Attention, les radars privés arrivent

L’Etat a décidé de sous-traiter à des sociétés privées les contrôles de vitesse. Comment fonctionnent ces nouveaux radars privés, depuis quand et à quelle fréquence ? Réponses.

radars privés

Le conducteur est seul à bord d’une voiture banalisée. Sauf qu’à l’arrière du véhicule se cachent deux caméras et deux autres sont dissimulées à l’avant. Ce curieux équipage, ainsi que quelques autres, appartiennent à des entreprises privées, mandatées par l’Etat et qui, depuis le 20 avril de cette année, flashent les conducteurs en excès de vitesse. Une opération totalement automatisée, puisque le conducteur lui-même ne sait pas qui, ni quand, il verbalise.

Une multiplication des contrôles

Au-delà du transfert des compétences de l’Etat vers des sociétés privées, cette opération a des conséquences très directes. Que ce soit sur la vie ou le porte-monnaie des automobilistes. Jusqu’à présent, lorsque les policiers sont chargés des contrôles à bord de voitures, ils ne circulent que 1 heure 30 par jour. Mais dorénavant, les véhicules privés circuleront durant 8 heures chaque jour. Résultat : selon une estimation, le nombre de flashs annuels pourrait passer de 2 à 12 millions, lorsque tout le territoire sera couvert par ces voitures-radars. Car pour le moment, seules quelques-unes circulent.

L’Etat se veut rassurant

Evidemment, pour parer à toute polémique, l’Etat s’est voulu rassurant. Ainsi, les itinéraires suivis par les autos flasheuses doivent être obligatoirement définis par les forces de l’ordre. En outre, les entreprises chargées de ces contrôles ne pourront pas être rémunérées au nombre d’infractions constatées. Par ailleurs, ni ces sociétés, ni ces chauffeurs n’auront accès aux données concernant les flashs.

Des couacs judiciaires

Reste que le lancement de l’opération, pour l’instant en phase test, connait quelques déboires administrativo-judiciaires. Selon une récente note ministérielle, ces radars privés ne seraient pas conformes à la loi. C’est qu’en principe, le matériel nécessaire pour contrôler les infractions doit être mis à disposition par l’Etat, et non par des services privés. De même, le procédé de contrôle des routes ne serait pas conforme à la législation en matière de bonne moralité du personnel. Résultat : l’association 40 millions d’automobilistes a décidé de porter l’affaire devant le Conseil d’Etat sur la base de ces éléments. De plus, une pétition contre le projet a déjà recueilli plus de 400 000 signatures.

Des contestations, mais aussi des soutiens

Mais si la privatisation des radars a ses opposants, elle a aussi ses soutiens. En l’occurrence les associations de victimes de la route. Elles se félicitent surtout de la multiplication des contrôles que le phénomène va engendrer. Le nombre d’heures va décupler et ils se dérouleront plus seulement en journée, mais 24/24h ainsi que durant les jours fériés. Une manière, selon ces associations, de faire peser la présomption de contrôle partout et tout le temps. Puisque, ne sachant pas où ni quand se produira ce contrôle, tout le monde sera incité à rouler tout le temps à la vitesse légale.

Une mise en place par étapes

Evidemment, les freins judiciaires et sociaux doivent être levés avant la mise en place de ces nouveaux radars privés sur tout le territoire. Mais lorsque l’avis du Conseil d’ Etat sera rendu, lorsque les textes législatifs seront adaptés à la nouvelle donne, nul doute que des voitures anonymes truffées de caméras seront réparties dans tout le pays. Reste à savoir quel sera le choix des forces de l’ordre concernant les infrastructures à surveiller. Les autoroutes très fréquentées mais peu accidentogènes, ou les petites routes plutôt désertes, mais où se déroulent la plupart des accidents graves ?

Anne-Charlotte Laugier, journaliste, blogueuse et romancière (Ramsay).